Enquête sur lart (2e partie de 3) - ARTS VISUELS : lenquête se poursuit | |
Référence
: Chantal Roussel - Le Front, 5 février 2002
La semaine dernière,
des témoins, ou plutôt des acteurs de la musique de Moncton,
nous ont révélé, avec preuve à lappui,
quil y a une tendance véritable. Cette dernière penche
vers lavant-garde, épouse les formes du style contemporain.
La tendance sest appropriée le son, mais les images, quen
fait-elle? Bien sûr, elle sest aventurée jusque dans
les arts visuels. Et Le Front veut savoir jusquoù et comment
elle sy est prise. Jennifer Bélanger et Herménégilde
Chiasson en ont long à dire à ce sujet. Leurs propos, scrutés
à la loupe par Le Front, mènent lenquête dans
une direction fort intéressante. Une dynamique Artiste-peintre, fraîchement diplômée de lUniversité de Moncton en arts visuels, Jennifer Bélanger est le témoin idéal pour Le Front. En linterrogeant, on comprend quelle est une véritable artiste dans sa définition la plus idéale. En effet, lorsquon lui demande pourquoi elle a choisi la peinture comme moyen dexpression, elle répond de sa voix douce : |
Jennifer Bélanger |
« les arts visuels mintéressent depuis que je suis jeune, cétait très présent dans ma famille. Jai un besoin de peindre et je le fais ». Lart nest-il pas plus beau quand il est motivé par un besoin, plutôt que par un choix? Et son inspiration, où va-t-elle la chercher? « Dans la vie de tous les jours, je raconte le vécu », indique-t-elle. Elle travaille présentement sur laspect de la petite fille : « la petite fille est toujours présente dans lhistoire de lart comme étant quelque chose de « cute », de gentil, indique-t-elle. Moi, je voulais un peu casser ça et prendre le côté sociopathe de lenfant. Un peu pour briser ce quon connaît et questionner les choses ». Voilà la tendance qui apparaît. Nous savons tous que ce nest pas évident de vivre de son art, même dans les grands centres. On peut simaginer quà Moncton, ça lest encore moins. Cependant, Jennifer croit quil y a certains avantages à vivre ici : « Ici, cest peut-être plus facile de faire des connexions, cest une petite ville », indique-t-elle. Son opinion sur Moncton est très révélatrice pour notre enquête : « Je trouve quici, il y a vraiment une dynamique au point de vue de la relève. On est un groupe dune quinzaine [dartistes], on produit et on fait beaucoup de projets dexposition. « Ça bouge », affirme-t-elle. Cela suffirait à expliquer pourquoi elle a choisi de sinstaller à Moncton, mais elle ajoute toutefois : « Jai fait mes études ici et jai rencontré beaucoup de gens. » Encore une fois, lUniversité de Moncton revient dans les propos dun artiste. Son rôle sur lart est-il si prépondérant? |
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Une université et trois générations Un problème surgit : les idées de Jennifer pourraient bien être uniques. Qui sait si elles sont partagées par les autres artistes de la région, si elles sont véritablement le signe dune tendance? La réponse est simple : nul autre que Herménégilde Chiasson. Vétéran de lart dans tous ses états, fondateur de plusieurs infrastructures artistiques de la région de Moncton et homme sympathique, il a su rassurer Le Front. Sans les avoir entendus, il appuie les propos de Jennifer. En effet, il y a, selon lui, une belle dynamique à Moncton en ce qui concerne la création artistique. Sa vaste expérience dans le domaine artistique lui permet dagir non seulement comme témoin dans cette enquête, mais également comme élément explicatif. Tout comme en musique on veut innover, en arts visuels, on penche vers lavant-garde : « Nous ce quon propose souvent, ce sont des choses assez contemporaines », indique M. Chiasson. Comment expliquer lexistence de cette tendance en arts visuels? Vous lavez sûrement deviné, lUniversité de Moncton joue un rôle important : Je crois quil y a cette dynamique, parce quil y a une tradition qui vient du Département des arts visuels. Sil y avait eu la même formation en danse, il y aurait une troupe de danse à lheure actuelle. Il y a eu une formation en arts visuels, il y a aussi eu une formation en théâtre à lUniversité, donc il y a des troupes de théâtre. On pense entre autres au théâtre lEscaouette, qui est un produit direct de lUniversité de Moncton. » Cependant, M. Chiasson apporte un élément nouveau à notre enquête : « Le fait aussi quil y a trois générations en art, cest vraiment intéressant. Moi, je me souviens quand jai commencé, jétais vraiment tout seul. Il ny avait pas de galerie, il ny avait personne à qui je pouvais parler. À lheure actuelle, il y a cette première génération : des gens comme George Goguen, Claude Rousselle, Roméo Savoie. Il y a aussi la deuxième génération qui serait comme moi, Francis Coutelier, etc. Puis après ça, il y a la troisième génération, qui serait celle de Jennifer et puis tous les jeunes qui eux aussi sont sortis du département. Dans ce sens-là, ça crée une sécurité, parce que cest important pour un artiste de pouvoir parler à quelquun. Ce nest pas nimporte quel être humain qui peut faire quelque chose que personne dautre apprécie. Alors je pense que cest une des raisons pour lesquelles il y a eu cette dynamique à Moncton. » Avec ce deuxième indice, Herménégilde Chiasson met Le Front sur une bonne piste. En effet, il est évident que la tendance vers lart contemporain est bien vivante grâce à lUniversité. Cependant, elle ne saurait se tenir debout longtemps sans le soutien moral que les artistes soffrent lun à lautre. Lidée des trois générations explique sans doute pourquoi la tendance nest pas un phénomène éphémère. En somme, Le Front constate que les arts visuels vivent la même tendance que la musique. En effet, cette forme dexpression vit également tout un mouvement de modernité opposé à la vision traditionnelle de lart acadien. Lenquête sur les arts visuels a permis de renforcer la thèse initiale du Front : il y a une dynamique de création hors du commun à Moncton. Or, plus on lobserve, plus on constate quelle est extraordinaire et quelle vaut la peine dêtre étudiée. Que nous dira lenquête sur les lettres? Cest à voir la semaine prochaine. |
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